J’aime particulièrement dans la pratique quotidienne de la sculpture la manière dont les volumes vous bousculent.
En fait ils percutent mes idées sans façons, tien prends ça dans les dents, pour parfois m’amener là où je résiste à aller. J’ai un exemple de ce que je dis : j’ai rencontré il y a quelques
temps les copropriétaires d’une citée qui veulent donner du lustre à leur environnement en installant une sculpture. Il se trouve que la cité avait une chaufferie autonome surmontée d’une
cheminée de 40 mètre de haut. L’osque je l’ai vu j’ai compris que j’avais trouvé mon socle.
Puis, je me suis mis à réfléchir à la forme et donc au contexte du projet. Comme toujours dans ces cas là, les idées qui se bousculent ne sont pas nombreuses et rarement mirobolantes. J’ai même
pensé un moment en voyant cette longue cheminée qu’on dirait une allumette ! Aussi, pour prendre un peu d’altitude, s’agit quand même de pondre un truc qui marque l’histoire de l’art et les
générations futures, j’ai décidé que la cheminée n’était pas un socle mais une sculpture à part entière et qu’il fallait l’investir dans sa totalité. J’ai donc imaginé un enchevêtrement vrillé de
chaines de montagnes verticales au lieu d’horizontales dont voici une image.
Une bonne nuit de sommeil sur cette fabuleuse idée et un constat au réveil : voici un projet compliqué, hors de prix et pas du tout original. Bref, le contraire de ce qu’il prétend être. Et
puis tout à coup une étincelle capte mon œil en regardant les images de la chaufferie. On dirait qu’elle va fumer, que l’allumette va prendre feu. J’ai envie de rire. L’alumette s’impose
définitivement lorsque je comprends que par la forme que je donne à la tête de l’alumette, je peux créer des jeux de lumières qui donnent l’impression qu’elle scintille, qu’elle est vivante et
qu’elle va s’embrasée. La nuit, un réseau de diodes clignotantes se chargerait de l’effet de scintillement et un fumigène les jours de fête ferait fumer l’allumette tout en évoquant le passé de
cette monumentale construction. Le tout en aluminium anodisé pour la légèreté et ajouré pour la ligne et éviter la prise au vent et j’ai la forme idéale à mes yeux : une cheminée qui fait
partie intégrante de la forme et qui avec presque rien devient autre chose en évoquant ce quelle fût ! Le plus troublant dans cette histoire ce n’est pas que l’idée soit bonne mais qu’elle
le soit devenu à mes yeux par la force d’une géométrie simple et évidente : un tube.
Commenter cet article